AFP/LOIC VENANCE
Au secours ! Tout va trop vite !
SENTIMENT D'URGENCE
Voilà le portrait du moderne, selon le sociologue allemand Hartmut Rosa. Le temps désormais s'accélère et nous dévore, comme hier Cronos ses enfants. L'accélération technique, au travail, sur les écrans, dans les transports, la consommation, a mené à l'accélération effrénée de notre rythme de vie. Puis a précipité le changement social. Rien n'y résiste.
Les métiers changent en quelques années, les machines en quelques mois, aucun emploi n'est assuré, les traditions et les savoir-faire disparaissent, les couples ne durent pas, les familles se recomposent, l'ascenseur social descend, le court terme règne, les événements glissent.
L'impression de ne plus avoir de temps, que tout va trop vite, que notre vie file, l'impression d'être impuissant à ralentir nous angoisse et nous stresse. Ainsi Hartmut Rosa, 45 ans, professeur à l'université Friedrich- Schiller d'Iéna, développe sa "critique sociale du temps" de la "modernité tardive" dans sa magistrale étude, Accélération (La Découverte).
Après les études inquiètes de Paul Virilio sur la vitesse, Hartmut Rosa examine la dissolution de la démocratie, des valeurs, de la réflexion, de notre identité, emportées par la vague de l'accélération. Entretien de rentrée, alors que déjà, tous, congés derrière nous, on se magne.
C'est la rentrée, le moment où on ressent avec le plus d'acuité la façon dont nos vies s'accélèrent. Nous avons même souvent le sentiment que les vacances se sont passées à toute allure. Comment expliquer ce sentiment d'urgence permanent ?
Hartmut Rosa : Aujourd'hui, le temps a anéanti l'espace. Avec l'accélération des transports, la consommation, la communication, je veux dire "l'accélération technique", la planète semble se rétrécir tant sur le plan spatial que matériel
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